Pourquoi les défenseurs du climat surveilleront de près le Conseil des Etats lors de la session d'automne
Après le rejet par le peuple de la loi sur le CO2 l'année dernière, l'initiative des glaciers augmente la pression sur les politiques pour qu'ils adoptent des mesures efficaces de protection du climat. Plus de 100 000 électeurs demandent l'abandon progressif des sources d'énergie fossiles d'ici 2050. Un contre-projet à l'initiative pourrait être réalisé plus rapidement. Mais les initiateurs ne veulent retirer l'initiative populaire que si des instruments efficaces de réduction du CO2 sont adoptés.
La Suisse peine à protéger le climat, mais aussi à se tourner vers davantage d'énergies renouvelables. Certes, le Conseil fédéral a décidé il y a trois ans, avec l'objectif climatique 2050, que la Suisse ne devrait d’ici là pas émettre plus de gaz à effet de serre que ce que les réservoirs naturels et artificiels sont capables d’absorber. Le gouvernement suisse a ensuite réaffirmé l'objectif de zéro émission nette l'année dernière dans le cadre du contre-projet direct à l'initiative sur les glaciers. Auparavant, un revers s’était produit.
Une action de grande urgence doit sauver la loi sur le CO2
La loi sur le CO2, qui est révisée tous les dix ans, est le principal instrument de la politique climatique suisse. Pour rappel, la loi sur le CO2 est entrée en vigueur le 1er mai 2000 en tant que loi fédérale sur la réduction des émissions de CO2. Elle a été partiellement révisée en 2011 et à nouveau en 2016 suite à l'accord de Paris.
En 2019, la loi a fait l'objet d'une révision totale afin de répondre aux exigences de l'objectif "zéro émission nette" du Conseil fédéral. Cependant, lors de la votation fédérale du 13 juin 2021, 51,6% de la population ont dit non à la loi révisée. Le comité référendaire avait mis en avant une argumentation simple mais efficace : avec la loi sur le CO2, le chauffage et la conduite automobile deviendraient massivement plus chers. Cet argument a été suivi par une petite majorité des votants. Le choc des partisans de mesures efficaces de protection du climat - dont POW - a été total.
Mais même les opposants étaient conscients que la Suisse avait besoin d'une réglementation en matière de réduction du CO2. C'est pourquoi, lors de la session d'hiver 2021, le Parlement a prolongé en toute vitesse la loi sur le CO2 en vigueur jusqu'à fin 2024.
Les réalités politiques découragent le Conseil fédéral
Pour la période à partir de 2025, le Conseil fédéral a proposé en toute hâte un nouveau projet de loi. La consultation sur le nouveau paquet de mesures climatiques pour la période 2025-2030 a duré jusqu'en avril 2022. Les milieux environnementaux ont déploré le manque de courage du Conseil fédéral, dont le nouveau projet n'atteint ni les objectifs climatiques officiels de la Suisse pour 2030, ni les objectifs bien plus ambitieux nécessaires pour contribuer de manière adéquate à l'objectif global de 1,5° C.
Selon le projet, les émissions de gaz à effet de serre doivent, conformément à l'accord de Paris, être réduites de moitié d'ici 2030. En ce qui concerne la réduction des émissions, l'objectif est d'atteindre un rapport intérieur/extérieur de 60:40. Mais l'ensemble du paquet de mesures reposait sur l'hypothèse qu'une grande partie des réductions serait réalisée par des compensations à l'étranger – cependant, leur financement n'a pas été réglé dans la loi.
Afin d'éviter une deuxième défaite dans les urnes, l'introduction de taxes supplémentaires dans les domaines des transports et de l'aviation a été abandonnée. En revanche, des subventions pour les carburants d'aviation synthétiques ainsi que pour la mise en place d'infrastructures de recharge pour l'électromobilité ont été prévus. En outre, le Programme cantonal des bâtiments devrait recevoir davantage de fonds, mais il manque par exemple l'interdiction des installations de chauffage à énergie fossile dans les nouveaux bâtiments, bien que plusieurs cantons aient introduit une telle interdiction à partir de 2022 ou soient en train d'élaborer des projets concrets.
L'initiative pour les glaciers maintient la pression pour des mesures efficaces
Les organisations qui exigent une protection efficace du climat ont encore un jeton spécial entre les mains dans le poker politique : L'initiative pour les glaciers. Cette initiative populaire, signée par plus de 100 000 électeurs, exige l'abandon progressif des énergies fossiles d'ici 2050. Et elle a de bonnes chances de passer. Cela pose un problème à la politique suisse.
Le 11 août 2021, le Conseil fédéral a adopté le message relatif au contre-projet direct à l'initiative. Le contre-projet confirme l'objectif zéro émission nette, mais renonce à l'interdiction des énergies fossiles.
En plus du contre-projet direct du Conseil fédéral de 2021, la Commission de l'environnement du Conseil national (CEATE-N) a proposé en avril 2022 un contre-projet indirect à l'initiative sur les glaciers. Cette loi dite «loi-cadre sur le climat» contient l'objectif zéro émission nette, une trajectoire de réduction contraignante pour les émissions de gaz à effet de serre ainsi que des mesures dans le domaine du chauffage et des bâtiments.
Un contre-projet indirect au niveau de la loi permettrait une mise en œuvre plus rapide qu'une modification de la Constitution, telle qu'elle est prévue dans le contre-projet direct et l'initiative. Compte tenu de l'urgence, l'Association suisse pour la protection du climat se prononce en faveur d'un contre-projet indirect, à condition que celui-ci prévoie des objectifs suffisamment élevés et des mesures efficaces.
Le Conseil des Etats a les cartes en main
Le contre-projet indirect à l'initiative sur les glaciers sera maintenant traité lors de la session d'automne : Après que le Conseil national ait traité et finalisé le concept pour la première fois cet été, le soulagement était palpable du côté du comité d'initiative face à un projet de loi relativement ambitieux. Mais la commission de l'environnement du Conseil des Etats a mis des bâtons dans les roues des initiateurs : des mesures importantes dans le domaine du bâtiment ont été réduites.
Le suspense est assuré : le 15 septembre, le Conseil des Etats débattra pour la première fois du contre-projet indirect, et quelques jours plus tard, ce sera au tour du Conseil national d'éliminer d'éventuelles divergences. L'objectif déclaré est que les deux Chambres éliminent leurs divergences et mettent le projet de loi sous toit d'ici fin septembre.
Nous restons à l'écoute et vous tiendrons informés tout au long de la session d'automne !