Session d'automne : progrès dans la protection du climat et le développement de l'énergie solaire, protection de l'environnement sous pression
La politique climatique et énergétique a été au cœur des débats de la session parlementaire d'automne qui s'est achevée vendredi dernier. Petit récapitulatif des principales décisions prises dans le domaine du climat et de l'énergie.
Le contre-projet indirect à l’Initiative pour les glaciers a abouti
Le Conseil des États a accepté le contre-projet indirect à l’Initiative pour les glaciers sans lui apporter de modification majeure par rapport à la version validée par le Conseil national en juin dernier. Intitulée «Loi fédérale sur les objectifs en matière de protection du climat», le contre-projet indirect fixe des objectifs intermédiaires et des mesures concrètes pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre à zéro d’ici 2050. Contrairement au texte de l’Initiative, la nouvelle loi-cadre ne fait pas état d’une interdiction explicite des énergies fossiles, mais favorise les programmes d'encouragement. Deux milliards de francs sont prévus sur dix ans pour inciter les propriétaires à changer de chauffage et abandonner les installations fossiles. Acceptée avec seulement trois voix d’écart par le Conseil des États, la subvention pour le remplacement des chauffages était l’une des mesures les plus contestées.
Face à cette avancée majeure pour la protection du climat, le comité d’initiative a annoncé un retrait conditionnel de l’Initiative pour les glaciers. Sur ce point, tout reste encore à faire. Fustigeant notamment « une loi dévoreuse d’électricité », l’UDC a en effet déjà fait part de son intention de lancer un référendum. A titre de rappel, au vu de l’urgence climatique, le comité d’initiative privilégie l’adoption d’un contre-projet indirect, dont l’entrée en vigueur serait plus rapide que celle d’une initiative de rang constitutionnelle.
Politique énergétique : place au solaire
Face au spectre d'une pénurie d'électricité, le Parlement opte pour une offensive des énergies renouvelables, et tout particulièrement du solaire. Afin de pouvoir avancer au plus vite, le développement des installations photovoltaïques et le projet de rehaussement du barrage du Grimsel ont été discutés dans le cadre d’une loi urgente intégrée aux débats sur le contre-projet indirect à l'Initiative pour les glaciers. En ce qui concerne la question solaire, deux mesures phares ont notamment fait l’objet d’âpres débats : l’obligation de munir les nouveaux bâtiments d’une installation solaire et l’assouplissement de la procédure pour la construction de grandes installations photovoltaïques, notamment dans les régions alpines.
Au grand dam des Verts, seules les nouvelles constructions d'une surface supérieure à 300m2 devront finalement être équipées de panneaux photovoltaïques ou d'une installation solaire thermique. Cette restriction exclut 70% des surfaces potentielles, dont la plupart des maisons individuelles, regrette le parti écologique qui s’engageait pour que la surface minimale soit abaissée à 100m2. Désormais considérés d’intérêt national, les grands parcs solaires alpins – tels que ceux envisagés en Valais à Gondo et à Grengiols – pourront obtenir une aide fédérale. Pour faciliter leur réalisation, les exigences environnementales ont été abaissées, mais la protection de la nature devra toutefois continuer à être prise en compte.
Électricité versus environnement
Jusqu’où est-on prêt à faire des concessions en matière de protection de l'environnement pour faire avancer le développement des énergies renouvelables ? Pour la majorité bourgeoise de la commission préparatoire du Conseil des États, tant que les objectifs de développement énergétique ne sont pas atteints, la protection de la nature doit être subordonnée à la production d'électricité. Dans le cadre des premières délibérations sur le deuxième volet de la stratégie énergétique 2050 – « Loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables » (révision de la loi sur l’énergie et de la loi sur l’approvisionnement en électricité) – la commission en question a ainsi proposé d’envisager la construction d’installations électriques dans des biotopes d'importance nationale et d’abroger certaines parties de la loi sur la protection des eaux, notamment concernant les débits résiduels des barrages. Ces propositions ont engendré une levée de boucliers des organisations de protection de la nature et de l'environnement, consternées par les dommages irréversibles et disproportionnés qu’entraineraient de telles mesures pour la production de quantités d’électricité non pertinentes.
La chambre haute a finalement opté pour une pesée des intérêts : les énergies renouvelables doivent certes être développées rapidement, mais la production d'électricité ne doit pas totalement primer sur la protection de l'environnement. Les sénateurs et sénatrices ont refusé d’abaisser les débits résiduels des cours d’eau, mais ont choisi de laisser la porte ouverte pour la construction d’installations hydrauliques, éoliennes et solaires dans des régions telles que le Maderanertal, le Val Roseg ou la Greina. Sur ce dernier point, les associations de protection de la nature comptent sur le Conseil national pour corriger le tir. Hasard du calendrier, la chambre basse a, durant la session écoulée, débattu de l'Initiative sur la biodiversité, demandant une protection accrue de la diversité des espèces.
Un bilan mitigé
Paradoxalement, la dernière session parlementaire a certes permis de grandes avancées, mais a également donné lieu à des revers importants pour la protection du climat. Si nous nous réjouissons tout particulièrement que le contre-projet indirect ait pu être accepté sans être édulcoré, nous regrettons cependant le lancement d’un nouveau référendum contre un projet de loi équilibré (pas d'interdiction des énergies fossiles, soutien aux entreprises et à l’innovation technologique, aide aux particuliers qui souhaitent changer de chauffage), qui nous permettrait enfin de tenir les engagements pris lors de la signature de l'accord de Paris.
En ce qui concerne l'offensive solaire, le projet va globalement dans la bonne direction. Néanmoins, même si les circonstances actuelles et la menace d’une éventuelle pénurie d’électricité exigent des mesures particulières, le droit de recours des associations et la protection de l'environnement doivent impérativement être respectés. Reste à savoir à quelle vitesse de telles installations peuvent être construites et, surtout, quel sera leur impact sur la biodiversité. Finalement, en optant pour une obligation solaire partielle dans le domaine du bâtiment, le Parlement a manqué l’opportunité de réduire rapidement notre dépendance aux sources d'énergie fossiles.
Les discussions ne font que commencer et les prochains mois s’annoncent d’ores et déjà passionnants pour la politique climatique et énergétique de la Suisse.